jeudi 16 février 2017

Nom : Xylella, prénom fastidiosa.

Xylella fastidiosa est une bactérie difficile à cultiver en laboratoire (d'où son petit nom de "fastidieuse") mais qui se développe bien dans le milieu naturel. C'est un nommé Pierce qui l'a décrite pour la première fois en 1887 : c'était l'agent pathogène d'une maladie de la vigne observée en Californie - que l'on appelle depuis "Maladie de Pierce".

Depuis cette époque, on a pu se rendre compte que la bactérie en question est "polyphage", c'est à dire qu'elle se nourrit de nombreux végétaux. Elle infecte ainsi, outre la vigne : le pêcher, le prunier, le cerisier, l'amandier, le laurier, l'olivier, l'oranger, l'orme, le chêne, l'avocatier, le mûrier... Son vecteur de dissémination est en particulier la cicadelle, une famille d'insectes suceurs qui se nourrissent de la sève des plantes et qui, à cette occasion, transportent la bactérie. Notons au passage que les cicadelles peuvent transporter d'autres agents pathogènes...

On ne sait pas traiter les infections bactériennes des végétaux. L'utilisation des antibiotiques est (heureusement) interdite dans ce cas-là. Le seul traitement possible est l'arrachage et l'incinération des plants contaminés. On arrive ainsi à contenir la dissémination du "feu bactérien" du pommier ou du poirier (causé par Erwina amylovora). Une alternative prophylactique est de n'utiliser que des porte-greffes résistants.

En 2013, on a découvert des oliviers contaminés dans les Pouilles, cette province italienne qui forme le talon de la botte. Les scientifiques ont aussitôt organisé la riposte : on arrache, on brûle! Mais les agriculteurs (et une bonne partie de la population) ont vu les choses autrement. "Ces scientifiques sont les agents des multinationales de l'agrochimie. Ce sont eux qui ont disséminé la bactérie!" Et un juge a mis les scientifiques en examen. Les arrachages ont cessé.

En 2016 on isolait la bactérie sur des oliviers en Corse. Aujourd'hui, elle est aux Baléares. Et on se prend à imaginer le pire. L'Espagne, premier producteur mondial d'huile d'olive, pourrait se retrouver ruinée.

On a raison d'imaginer le pire. La cicadelle et la bactérie sont bien plus efficaces que nous. Et les plantations d'olivier vont disparaître, dans les années qui viennent, d'autant plus vite que les plantations sont étendues. D'ailleurs, nous avons tous déjà constaté l'augmentation du prix de l'huile d'olive, dans nos supermarchés. Malheureusement, l'huile vieillit assez mal, et il n'est pas possible d'en stocker pour des durées longues.

J'ai vu disparaître les ormes, dans les années 1980. Et un jour viendra où les plantations de palmiers à huile indonésiennes disparaîtront aussi, dès qu'un pathogène se sera installé.

Quel dommage que l'intérêt local, immédiat, passe toujours avant l'optimum global, sur le long terme...

H

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